Ca ne vous rappelle rien ?

 

Le Figaro

Mercredi 28 novembre 2017.

 

Réforme de la justice : Belloubet critiquée !

 

Des magistrats refusent la concertation mise en place par la Chancellerie, dénonçant un simulacre.

PAULE GONZALÈS

 

On ne les y reprendra pas. Les magistrats ont été échaudés par les vraies-fausses concertations de l’ère Taubira sur la réforme pénale et la justice du XXIe siècle. Ils s’insurgent aujourd’hui contre la demande de la Chancellerie d’une concertation à marche forcée sur les cinq chantiers de la justice, qui doit se clore au 15 décembre. JUSTICE La présidente de l’Union syndicale des magistrats (USM) vient d’écrire à la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, et ne mâche pas ses mots. « Dans plusieurs ressorts, les assemblées générales ont adopté des motions pour dénoncer cette concertation de pure façade, chacun ayant le sentiment que, malgré l’affichage, les projets sont déjà arrêtés, écrit Virginie Duval. En effet, plusieurs éléments démentent vos affirmations selon lesquelles les projets ne sont pas déjà définis. » Et de dénoncer par exemple le fait que « s’agissant du questionnaire sur la réforme de la procédure pénale, nombre de questions semblent directement inspirées des demandes récurrentes du ministère de l’Intérieur », voire même annoncées comme la forfaitisation des infractions « concernant les stupéfiants ». Idem en matière de procédure civile. « Bien des sujets ont déjà été abordés par les groupes de travail et, pour bien des questions, nous avons déjà les réponses, s’insurge Virginie Duval. La manière de poser les questions induit les réponses. » Dans son courrier, elle évoque le chapitre numérique « qui comporte également des questions très orientées » plutôt qu’un recensement des besoins réels. Quant « au sens et à l’efficacité de la peine », la présidente de l’USM dénonce tout à la fois « le questionnaire très large et des projets déjà annoncés, y compris par le président de la République, notamment l’Agence nationale des travaux d’intérêt général, dont il n’existe pas le premier euro de budget dans la loi de finances 2018 », souligne-t-elle en marge de son courrier. Démaillage territorial Enfin, « la réforme de la carte judiciaire est la plus biaisée (….), poursuit-elle. En effet, le TPI départemental était annoncé par le président de la République lors de sa campagne électorale (…)

Cela se traduit d’ailleurs dans “le guide du déclarant”, annexé à la circulaire sur la déclaration d’intérêts, mentionnant que celle-ci devra être remise au président ou au procureur du “tribunal de première instance”. » Autrement dit, l’idée d’une refonte de la carte judiciaire qui agrégerait tribunaux de grande instance et tribunaux d’instance autour d’un tribunal de première instance unique, peu ou prou par département, serait quasi actée. Le spectre d’une réforme à la hussarde, comme celle menée par Rachida Dati en 2011, ressurgit et déjà les barreaux de province se sont mobilisés dénonçant un démaillage territorial. Pour toutes ces raisons, Virginie Duval estime qu’« il est temps d’arrêter ce simulacre de concertation. Nous discutons là sur du vent. Il serait préférable que la Chancellerie nous présente ses textes et que nous puissions discuter sur des bases claires plutôt que sur du vide ». Déjà, les TGI d’Aix, Dijon, Saint-Nazaire, Nevers et Toulouse ont fait savoir qu’ils renonçaient à participer à toute concertation. Une fronde qui pourrait s’étendre avec d’autant plus de facilité que, lors de son 51e congrès, le Syndicat de la magistrature a tenté de mobiliser ses troupes avec virulence contre la tutelle de la Place Vendôme exercée par l’Élysée et le ministère de l’Intérieur. Sans oublier le ministère des Finances. Car une chose est certaine : nul n’échappera au plan d’économie des finances publiques.