Qui aurait parié, il y a 30 ans, que Calais allait sortir grand gagnant de la compétition transmanche entre Boulogne et les ports belges. Pour ce qui est du ferroviaire la question ne se posait, bien sûr, mais pour les ferries ce n’était pas gagné.
Pourquoi Calais ?
Parce que, c’est la distance la plus courte et c’est donc l’endroit où les ferries ont la rotation la plus rapide entre le Royaume-Uni et le continent européen. Or, comme pour les avions, les ferries ont vocation de faire le maximum de navettes pour s’assurer de la meilleure rentabilité. Toutes les compagnies ont d’ailleurs choisi cette destination au détriment des autres. Boulogne avec sa chambre de commerce de l’époque avait bien essayé de grappiller du trafic en s’équipant d’une plate-forme transmanche. Celle-ci n’a jamais fonctionné et n’a jamais réussi attirer la moindre compagnie maritime, malgré un effort substantiel d’investissement, à l’époque.
Aujourd’hui les jeux sont faits. Calais monopolise le trafic. La très prochaine mise en service de trois nouveaux quais de débarquement clôt définitivement cette question…
En dépit des contraintes du Brexit et du Covid, la société danoise DFDS vient d’introduire dans la danse le plus grand ferry transmanche, dénommé Côte d’Opale. Ce dernier effectuera cinq allers-retours par jour et aura une capacité double du précédent Calais Seaways. La compagnie P&O, de son coté, vient de positionner son cinquième bateau et la nouvelle société irlandaise Irish Ferries va apporter une compétition supplémentaire avec, à terme, trois bateaux assurant la liaison Calais Douvres.
Tous ces projets nous interrogent à la lumière d’une baisse sensible du trafic transmanche passager, en particulier. À témoin, le trafic du shuttle d’Eurotunnel a subi une baisse d’activité marqué : les chiffres des mois de juillet sont significatifs : 2018 : 315 000 passagers, 2019 : 294 000, 2 020 : 233 000 et 2021 : 99 000… Le trafic camions, par compte, a été moins affecté : en juillet 2018, le Shuttle a fait transiter 140 5000 camions versus 124 000 camions en 2021.
On peut espérer que le trafic reprendra de la couleur. Les Britanniques principaux utilisateurs de cette liaison transmanche reviendront assurément sur l’autre rive du détroit dès que les conditions sanitaires se seront stabilisées.
Le formidable outil que représentent la combinaison du tunnel et des trois compagnies maritimes va générer une concurrence qui devrait favoriser une baisse de prix, d’autant que les différentes sociétés pourront tirer parti des Duty Free ouverts aussi bien pour les compagnies maritimes que pour Eurotunnel.
Par contre, le simple regard sur les tarifs des différents compétiteurs surprend, tant les tarifs sont largement plus élevés (plus du double) que ceux des années précédentes.
La CMA britanniques (commission de concurrence des marchés) qui s’était émue de constater les accointances financières entre Eurotunnel et My ferry Link. Elle avait contraint cette première à dissoudre la société maritime sous prétexte que la compétition serait réduite et que le consommateur en subirait les conséquences. On imagine bien que la situation d’aujourd’hui est largement plus défavorable pour le consommateur qu’à l’époque. Il serait donc bien curieux que la CMA n’y met pas sont grain de sel.
Tout ceci est crucial pour la Côte d’Opale, tant la clientèle britannique contribue à l’activité du tourisme, notamment en hors saison.